Chapitre 4 – Alexander Lang

Entre la forêt et les terres avides où se trouvait le volcan au loin, Alexander Lang s'éveilla. Assis en tailleur à côté de lui se trouvait Sylvio Estavilla. Il remarqua son réveil, -d'un haussement de sourcil- mais ne dit rien.

L'aube se levait imperceptiblement au loin. Pourtant, Alexander Lang battait sans arrêt des yeux. La lumière était trop puissante. Des larmes coulaient de ses yeux, essayant de laver les globes oculaires, tentant de redonner la vue par le lavement.

Mais l'humain vicié ne pourrait plus être lavé de ses « pêchés », « erreurs », « nature »,... Peu importait le terme.

Il venait d'atteindre un point de non-retour et il en avait parfaitement conscience.

Sylvio Estavilla tourna son visage vers le sien et le regarde. Il juge si le moment est le bon. Depuis quatre mois qu'Alexander Lang vit avec Jesus Arturus, il a remarqué et observé les changements. Il doit être le seul, du moins celui qui y a prêté le plus d'attention.

- Qu'est-il arrivé ? //Finit par dire Alexander Lang.//

- … //Hésite à répondre Sylvio Estavilla.//

Il se relève et observe au loin les ruines fumantes de ce qui reste de l'usine à fabrication de démons. Alexander Lang se relève à son tour et remarque à quelques pas loin de là, la présence de Joan Hatchet. Son masque qui était alors blanc a rougi du sang qu'il a absorbé.

- Lorsque nous sommes arrivés, tu tombais sous les coups des démons. Nous nous sommes précipités et avons tués les derniers. //Expliqua Sylvio Estavilla.//

- Heureusement pour toi, tu guéris vite. //Ajouta Joan Hatchet.//

- … //Dit Alexander Lang.//

Des questions tournent dans sa tête. Son cerveau chercher à combler les trous, à expliquer ce qui n'est pas clair. Comment l'ont-ils traînés jusqu'ici ? Comment a-t-il fait pour survivre à toutes ces blessures ? Car ses vêtements sont déchirés de part en part. Le nombre de cicatrices sur son corps est affolant.

Mais plus que tout : a-t-il vraiment vu l'Ange Rouge ? Était-ce une hallucination ?

- Le reste du groupe est reparti au campement. En possession des informations sur Santa Monica. Elles sont cryptées mais nous avons foi en nos méthodes pour trouver ce qui se cache derrière le code. // Continua Sylvio Estavilla.//

- Je- //Commença Alexander Lang.//

Soudain, tout devient rouge, noir et blanc.

…

-

…

-

…

A son réveil, Alexander Lang ne reconnaît plus l'endroit. Non, en fait, il ne reconnaît pas ce qu'il voit. Sa vision a changé. Sa perception de l'espace, la reconnaissance des couleurs, la différenciation des textures. Tout est différent. Les sons ont des couleurs. La réalité chante et danse sous le filtre de ses appétits.

Il baisse la tête, la posant dans le creux de sa main, entre son index et son pouce. Il essaye de réfléchir à ce qui s'est passé. Il ne comprend rien. Il ouvre à nouveau les yeux et reconnaît les corps de Sylvio Estavilla et de Joan Hatchet. Ils sont ensanglantés.

Une violente douleur aigüe foudroie l'humain vicié. Les yeux fermés, il pose son index et son majeur sur sa tempe droite. Il se rend compte alors que sa peau a changé. Ses doigts sont devenus des griffes. Sans compter que ses paupières se sont fermées bizarrement. Il les ouvre et les ferme de nouveau. Un double système de fermement. Une paupière qui se ferme de haut en bas. Une autre qui se ferme de droite à gauche. Est-ce temporaire ? Comme la mue d'un serpent ? Il ne sait pas et à plus important à penser.

Il s'approche des corps et ait pris soudain d'une furieuse sensation d'omnipotence. Comme un junkie après une dose massive de drogue dure. Comme un moine accédant à l'éveil. Il s'écarte et remarque des petites lucioles de sang volées dans les airs. Ce n'en est pas. Ce sont les phéromones affiliées au sang qui déclenche des alarmes de prédateurs dans les tripes de l'humain vicié et fait dégouliner une bave importante le long de son visage.

Il s'éloigne des corps. La parcelle humaine qui reste de lui commande à son corps de s'échapper. De partir loin de la tentation. De lutter contre le démon dans son sang et de ne pas le nourrir plus que cela. Il s'en va, laissant ses compagnons esseulés.

Ses anciens compagnons dont des morceaux de chairs manquent. Dont le corps est percé de nombreux trous, correspondant à ses canines qu'il touche du bout de ses griffes. Une griffe qui passe au milieu de son tronc, car parcouru de fourmillement en son milieu. Un filet de sang coule alors. Est-ce l'effet de cette griffe acérée qu'il ne contrôle pas encore ou un nouvel effet secondaire ? Une sorte de troisième œil recherchant l'ouverture au monde.

Ayant fait quelques pas loin des cadavres de ses compagnons, il s'arrête et se retourne. Il tire l'épée de son fourreau et la plante dans le sol. Il posa un genou au sol et écrit un unique mot avant de repartir. Quelque part. N'importe où. Loin d'ici.

Un unique mot : DÉSOLÉ.